Le
5 juillet 2018, le ministère de l’Agriculture et de l’Elevage, en collaboration
avec l’ambassade du Royaume de Belgique au Niger et avec l’appui du PRADEL
(Programme d’Appui au Développement de l’Elevage), a organisé une conférence
sur le pastoralisme au Niger.
A travers l’exposé du Dr Sambo Bodé, Chef du
Département Géographie à l’Université Abdou Moumouni, il s’agissait de
sensibiliser les décideurs, chercheurs, acteurs de la profession et partenaires
techniques et financiers par rapport au contexte actuel de contraintes
socioéconomiques, climatiques et sécuritaires auquel font face les producteurs,
en particulier les éleveurs. Mais également de mettre en évidence la nécessité
de concevoir une politique de développement agricole.
Importance du pastoralisme au
Niger
Dans
la région sahélienne, le pastoralisme transhumant est un des systèmes d’élevage
dominant. Au Niger, 80 % du cheptel constitué de plus de 40 millions de têtes
de bétail suit un mode de production mobile. Le pastoralisme transhumant assure
la sécurité alimentaire des communautés d’éleveurs et présente beaucoup
d’atouts économiques, environnementaux, culturels et sociaux. Il permet de
valoriser des ressources naturelles (terre, eaux, sous-produits agricoles)
inégalement réparties entre les zones agro-écologiques à différentes saisons de
l’année.
En
chiffre :
- L’élevage
contribue pour 13% au PIB national ;
-
Cette
activité fournit 7% des recettes d’exportation du pays ;
-
On
estime qu’environ 95% de la population est concernée par les activités
d’élevage ;
-
…et
que 20% en tirent l’essentiel de leurs revenus.
Constats et défis du
pastoralisme
A
l’heure actuelle, l’élevage pastoral fait face à de nombreux obstacles liés à l’accès aux ressources et aux services sociaux
de base, à la complexité des conflits sociaux entre transhumants et
« sédentaires », la faible complémentarité entre agriculture et élevage, au
faible investissement sur les exploitations familiales pour renforcer leur
résilience, à la faible prise en compte des aspects du pastoralisme dans la
gouvernance dans le contexte de la décentralisation ou encore à la fermeture de la transhumance transfrontalière.
On
assiste à une rupture d’équilibre entre les ressources naturelles et les
besoins des populations. Il est donc urgent de repenser la gestion des systèmes
agricoles pour éviter une catastrophe écologique et humaine.
Réflexions
sur la nécessité d’une politique de développement agricole
A
l’issue des discussions, l’auditoire a adressé des suggestions à trois acteurs
cibles.
Tout d’abord et vu le rôle important de l’élevage dans
l’économie nigérienne, les participants recommandent à l’Etat d’investir
dans :
- La
viabilisation des frontières qui permettent de mieux contrôler les mouvements
des animaux ;
- Une
réglementation adéquate de l’accès aux ressources ;
- La maîtrise de la sécurité des transhumants et leurs bétails ;
- La
mise en place d’une véritable politique éducative pour les enfants en milieu
pastoral, l’éducation des acteurs étant une nécessité pour apporter des
changements à la hauteur des défis.
Ensuite,
certaines actions préalables à la mise en œuvre d’une politique d’envergure par
le Ministère en charge de l’élevage ont été relevées par l’audience telles que :
- La
maîtrise des statistiques animales ;
-
L’harmonisation,
popularisation et internalisation des textes sur le pastoralisme ;
-
L’innovation
en santé animale (pour circonscrire les pathologies contagieuses surtout), en
alimentation (ensemencement ou diffusion d’espèces fourragères résistantes,
complémentation en eau en début de saison humide, …), en pratique
d’exploitation (abattoirs modernes permettant de mieux tirer profit que le commerce
d’animaux sur pieds, …).
Enfin,
il y a un intérêt certain à trouver des solutions pour la transhumance transfrontalière
au niveau des Institutions sous régionales et régionales car cette pratique
procure des bénéfices tant pour les transhumants que pour les pays d’accueil. Des
textes existent (par exemple, CEDEAO de 1998) mais il est fondamental de les adapter
aux réalités actuelles pour ensuite les mettre en application.
Dans
le contexte actuel de changement climatique, il est nécessaire de mettre en œuvre
un élevage résilient et intelligent. La solution du pastoralisme au Niger est
nationale et les réponses sont à chercher, entre autres, dans une nouvelle
politique foncière (recommandation des états généraux du foncier, 2018) et dans
l’aménagement du territoire. Cette solution doit également compter sur la
complémentarité avec l’agriculture au Sud du pays.