La question de la prostitution des groupes spécifiques
vulnérables est rarement débattue sur la place publique. À Budjala dans le
Sud-Ubangi, les pairs éducateurs récemment formés par les responsables locaux
du PNSA et du PNSR (programmes spécialisés sur la santé des jeunes et
adolescents et santé de la reproduction du Ministère de la Santé), ont pris le
devant samedi dernier pour aller à la rencontre des jeunes de Budjala, certains
parmi eux identifiés comme des filles mineures, pour les sensibiliser sur les
questions de la santé sexuelle et reproductive et les conséquences de la
toxicomanie.
La consommation des boissons fortement alcoolisées et la prostitution chez les
jeunes gens vulnérables entre 15 et 24 ans ont pris une forte ampleur dans la
localité de Budjala. Ceci fait suite au constat des acteurs associatifs et de
la société civile de Budjala qui n’ont pas manqué d’alerter les structures
d’appui sur ces comportements devenus récurrents.
Conscients de ce défi et du rôle qu’ils sont appelés à jouer auprès de leurs
camarades et bénéficiant de l’accompagnement du Programme de Lutte
contre les Violences Sexuelles (PLVS), les pairs éducateurs de Budjala ont
initié des activités d’identification, de sensibilisation et de mobilisation
des groupes spécifiques vulnérables parmi lesquels des jeunes associés aux groupes
de gangs. L’identification de ces
groupes spécifiques a été le premier travail effectué par ces pairs éducateurs.
Leur démarche a consisté à cibler ces jeunes dans la communauté avant d’aller à
leur rencontre. Au total 25 jeunes filles et garçons ont été approchés
furtivement pour ce processus de changement de comportements à travers des
séances porte-à-porte dans la communauté. Pendant deux (2) jours les échanges
entre ces jeunes ont porté sur les questions des IST et VIH-SIDA, sur la
contraception des adolescents et jeunes, sur l’hygiène menstruelle et sur les
conséquences des avortements provoqués, invitant les jeunes à prendre des
décisions éclairées pour leur bien-être. La sensibilisation a porté également
sur les risques et les méfaits de la consommation de la drogue et des boissons
fortement alcoolisées pour éviter de tomber dans le cycle de la dépendance.
Après ces séances de sensibilisation communautaires, les jeunes identifiés ont
été conviés à prendre part, deux jours plus tard, à une grande tribune
d’expression populaire qui leur était spécialement dédiée.
Des témoignages des groupes spécifiques vulnérables
Au cours de la tribune d’expression populaire, encadrée par des partenaires de
l’Hôpital Général de Référence venus de Gemena et de la LIZADEEL Sud-Ubangi (La
Ligue zone Afrique pour la Défense des enfants, élèves et étudiants), les
questions de la sexualité ont été abordées sans tabous. La salle du Centre
artisanal de Budjala qui devrait accueillir 50 jeunes, s’est vue débordée par
près de 100 jeunes et adolescents, empressés de suivre les messages des
facilitateurs sur des sujets totalement tabous dans la communauté.
Certaines jeunes filles vulnérables ayant atteint leur majorité ont pris le
courage d’expliquer les raisons qui les poussent à la prostitution et les
jeunes garçons à la consommation des produits fortement alcoolisés (Zododo,
Agene, 88, Pastis,….). L’abandon des études par manque de frais et
l'irresponsabilité des parents, les maltraitances subies dans le milieu
familial et la précarité économique à Budjala ont été les principales raisons
avancées pour expliquer leurs comportements.
Après une demi-journée consacrée aux enseignements et aux questions-réponses
sur la sexualité, agrémentée par une production théâtrale éducative, plusieurs participants
ont exprimé leur entière satisfaction pour avoir participé à cette tribune
formative et pour ce qu’ils ont retenu. Certains ont aussitôt manifesté le
souhait de quitter la prostitution et d’autres de se reconvertir en pairs
éducateurs.
Le changement de comportements étant un processus, un travail de fond reste à
faire pour que cette reconversion soit réelle à Budjala.
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